La Double Maîtresse (French Edition)

About The Book

Extrait :Le château de Pont-aux-Belles où naquit Nicolas de Galandot, le 4 juin 1716, était un fort beau lieu et resté tel, comme le constata François de Portebize quand, après la mort de son oncle, accompagné du vieil intendant qui, les clefs à la main, lui en ouvrait une à une les chambres désertes, il en parcourut les hautes et basses salles avec tout le soin et le détail naturels à ces sortes de visites.. On pouvait admirer à Pont-aux-Belles, outre la bonne dimension des vestibules, l’heureux agencement des corridors et la parfaite entente des dégagements, avec je ne sais quoi de sévère et de solide, qui en rehaussait l’ordonnance. Tout y semblait pour favoriser une vie calme et réglée. Les escaliers par leurs larges marches et leur ample révolution conseillaient la lenteur des pas. Ils étaient aisés et justes à la montée comme à la descente, en proportion avec l’enjambée. La bibliothèque vaste et bien fournie disposait aux longues heures de lecture et de méditation. La salle à manger monumentale paraissait faite pour des repas copieux et graves, comme les salons pour s’y entretenir avec décence et cérémonie, plutôt en propos alternatifs et en fortes sentences que par plaisanteries et calembredaines.. Les hautes fenêtres y donnaient vue sur les jardins qui, par leurs allées régulières, leurs quinconces symétriques, leurs charmilles égales, semblaient reproduire au dehors le bel ordre intérieur. Devant le château, entre deux miroirs d’eau plate, sur une table de pierre, un cadran solaire marquait, de l’angle oblique de son gnomon de bronze, la durée du jour.. C’est à ce cadran que M. de Galandot, le père, sut que son fils Nicolas venait de coûter à sa mère un laborieux travail, car il était huit heures du matin quand la noble dame ressentit les premières douleurs et ce fut à trois de relevée qu’on accourut annoncer à son époux, au jardin où il avait fui le spectacle de l’opération naturelle dont sa femme supportait patiemment les épreintes, que la conséquence s’en trouvait un petit garçon à qui il ne manquait rien.. M. de Galandot se sentit fort soulagé. Il prit dans sa tabatière une large pincée de tabac, souleva son chapeau, mit sa perruque à la pomme de sa canne et s’essuya cérémonieusement le front. Il commanda aussitôt qu’on lui apportât à boire.. Un valet se montra bientôt avec une bouteille débouchée sur un plateau. M. de Galandot se versa un grand verre de vin, le haussa à la hauteur de son œil et le but à la santé du jeune Nicolas. Puis il se dirigea vers la chambre de l’accouchée pour le compliment d’usage qu’il abrégea, car il la vit sur ses oreillers, fort pâle et les yeux clos, ce qui mit quelque mesure à ses façons qu’il avait d’ordinaire fort tournées aux longs discours. Le nouveau-né lui apparut aux mains des matrones, rouge, ridé et grimaçant. Il se laissa dire que le poupon était en tous points bien conformé et digne de son père, ce qui le fit fort content de tous deux.. Bien que M. le comte de Galandot ne se départît pas facilement de sa gravité habituelle, il n’avait jamais été si ému depuis le jour où, orphelin, riche et pourvu de bonnes terres et d’écus sonnants, il était monté en carrosse pour aller demander au vieux M. de Mausseuil la main de sa fille cadette dont il souhaitait de faire sa femme, l’ayant vue à une assemblée où elle lui parut passer en sagesse et en agrément ce que la province offrait de beautés les plus qualifiées.. Le vieux Mausseuil habitait Bas-le-Pré, comme on sait, mais ce qu’on ne saura jamais assez, c’est combien il se trouvait être le plus grincheux et le plus rechigné hobereau qui se pût voir. Il tirait de sa pauvreté un venin particulier dont la bile colorait son visage jaune et infectait son caractère hargneux.
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